Modes de garde, lieux d’accueil : bien préparer le retour des enfants

Les enfants ont repris le chemin des crèches, multi-accueils et autres lieux d’accueil. Un retour marqué par la période de confinement qui, parfois, n’a pas été sans conséquences pour la vie de la famille. Les rythmes ont été bousculés. Des parents et des professionnels témoignent et partagent leur expérience et leurs conseils pour bien préparer le retour dans les lieux d’accueil.

Multi-accueil : "Il est important de préparer les enfants en amont"

Aude Perrin est responsable du multi-accueil l’Enfantine Bleue à Rezé qui accueille des enfants de 10 mois à 3 ans. Elle revient sur la période de déconfinement et nous donne quelques conseils pour faciliter le retour des enfants dans des lieux d’accueil et de garde.

Comment s’est passée la reprise, à la réouverture du multi-accueil ?

Les enfants sont revenus petit à petit. Tout s’est très bien passé. Nous avons commencé par reprendre des accueils réguliers en crèche, puis à la halte-garderie dans un second temps.

"La réouverture n’a pas seulement répondu à un besoin des parents, mais aussi à un besoin des enfants".

Tous les parents ne sont pas revenus tout de suite. Certains ont attendu de voir comment ça se passait. Nous avions un peu peur que les enfants marquent la séparation, mais nous avons été surpris par leur besoin de sociabilisation. Ils avaient envie de retrouver les autres enfants. La réouverture n’a pas seulement répondu à un besoin des parents, mais aussi à un besoin des enfants.

Avez-vous gardé un lien avec les familles pendant le confinement ?

Les membres de l’équipe ont envoyé des mails à toutes les familles, notamment un trombinoscope avec les photos de tous les enfants, ce qui a permis aux enfants de garder un lien entre eux. Certains parents ont, eux aussi, gardé un lien avec nous. Parallèlement les équipes sont restées en contact pour préparer et faciliter le retour. Parfois, l’initiative est venue des parents eux-même : certains passaient devant la crèche lors de leurs promenades avec les enfants pour qu’ils restent familiers du lieu.

Quels conseils donneriez-vous aux parents pour faciliter le retour des enfants ?

La chose la plus importante pour préparer la séparation est de bien transmettre à son enfant la certitude des retrouvailles après la journée ou demi-journée de crèche. On se dit au revoir mais c’est pour mieux se retrouver ensuite. Pour les premières séparations, il est important de préparer les enfants en amont, au moins deux semaines avant, de leur parler du lieu, de leur montrer, de faire le trajet avec eux.

"La fréquentation d’un lieu d’accueil enfants-parents est une excellente manière pour l’enfant d’avoir une approche du groupe, de la relation aux autres enfants et à d’autres adultes."

Les parents peuvent parler du lieu avec les enfants, évoquer les autres enfants, montrer des visuels et des photos lorsque les enfants se connaissent déjà. Pour les familles qui peuvent avoir des appréhensions, la fréquentation d’un lieu d’accueil enfants-parents (LAEP) est une excellente manière pour l’enfant d’avoir une approche du groupe, de la relation aux autres enfants et à d’autres adultes. Pour le parent, c’est aussi l’occasion de se familiariser avec l’idée de voir son enfant se détacher progressivement de soi pour aller vers les autres.

Et vous ? Comment ça se passe chez-vous ?

La crise sanitaire liée au Covid-19 a eu un impact sur les enfants et leurs parents. Vous n’avez pas tous vécu le confinement de la même façon et le retour dans les lieux d’accueil. Des parents témoignent :

Lucie et Jérôme sont les jeunes parents de la petite Anaïs, qui fera sa première rentrée en maternelle en septembre prochain.

"Nous travaillons tous les deux, raconte Lucie, et depuis l’an dernier, Anaïs allait à la crèche et ça se passait très bien. La crèche a fermé pendant le confinement et nous nous sommes retrouvés tous les trois à la maison, puisque moi comme Jérôme avons dû passer en télétravail". Le couple reconnaît que les débuts ont été difficiles. "Nous étions à la fois ravis de nous retrouver tous les trois, mais aussi inquiets de devoir tout faire en même temps", rapporte Jérôme. "Au début, Anaïs était très demandeuse de ses copains et copines, et puis ça s’est tassé. Lorsque nous avons vu que les choses commençaient à évoluer et que le déconfinement était proche, nous avons commencé à évoquer l’idée d’un retour avec Anaïs. La crèche a rouvert, mais comme ni moi ni Jérôme n’avions repris le travail en présentiel et que nous étions encore un peu inquiets de la situation, nous avons décidé qu’Anaïs n’y retournerait pas tout de suite", explique la maman. Anaïs a fini par reprendre le chemin de la crèche, quinze jours après sa réouverture. "Nous en avons beaucoup parlé avec elle, et nous avons repris progressivement un rythme normal. Ça n’a pas été simple. Anaïs dormait mal, elle ne comprenait pas pourquoi, tout à coup les petits habitudes que nous avions prises pendant le confinement disparaissaient. Et puis, elle a retrouvé ses copains et ses copines et ça a été mieux", se souvient Lucie.

Anne et Pierrick ont trois enfants. Noé, 2 ans et demi, Manon, 6 ans et Amandine, 8 ans.

Pierrick n’y va pas par quatre chemins : "très honnêtement, l’annonce de la réouverture des écoles a été une libération". Sans emploi au moment du confinement, le papa s’est retrouvé dans le rôle de la "nounou". "J’ai pu télétravailler de la maison, mais ça ne voulait pas dire que j’étais disponible", précise Anne. Lors du déconfinement, il a fallu s’organiser rapidement. "Noé est retourné chez l’assistance maternelle et Manon et Amandine à l’école, quasiment du jour au lendemain. C’est en tout cas l’impression que ça m’a fait", se souvient Pierrick. Le couple n’a pas vraiment eu le temps de préparer le retour des enfants à la vie normale. "j’ai juste dit à Noé dans la voiture qu’il y aurait un enfant en plus qu’il ne connaissait pas chez l’assistante maternelle, parce qu’elle m’avait prévenu", raconte Anne. "L’assistante maternelle a été top pendant le confinement. Elle a téléphoné plusieurs fois pour prendre des nouvelles et elle a envoyé des photos des jouets préférés de Noé". "On compte sur l’été et les vacances pour que tout le monde reprenne un bon rythme. Et au moins, si ça doit recommencer, on sera mieux préparés", ajoute Pierrick.

Marion est la maman de Lili, 4 ans. Elle est séparée de son conjoint.

"D’habitude ce sont les parents de mon ex-conjoint qui assurent l’intérim quand nous ne sommes pas disponibles. Ils ne sont pas loin, c’est pratique et en plus ça fait le lien avec la garde alternée. Pendant le confinement, mon ex-conjoint n’a pas voulu que Lili aille chez ses parents, même si eux étaient demandeurs. Ça a été difficile pour Lili de ne plus voir ses grands-parents. Bien sûr, elle pouvait les voir en vidéo, mais ce n’est pas pareil. Au moment du déconfinement, j’ai dû retourner travailler en présentiel. Lili a pu retourner chez ses grands parents. Elle était très heureuse de les revoir, mais elle s’est vite ennuyée. Avec le rythme que nous avions, à courir partout, nous n’avons même pas pensé à garder un lien avec les copains et les copines. Nous avons décidé de trouver une assistante maternelle pour qu’elle soit avec d’autres enfants."

Enfant avec un handicap : une situation parfois compliquée

Pour les enfants en situation de handicap, comme pour leurs parents, la période de confinement puis le retour en établissement a parfois été compliqué. C’est le cas de Sonia* maman quinquagénaire de trois filles. Amandine*, la plus grande, est atteinte de Trisomie 21. Au moment du confinement, elle était en accueil de jour dans un foyer.

 Pas de repères dans le temps

"Amandine est une personne très ritualisée qui n’a aucune notion du temps, explique Sonia. La vie en foyer est rythmée par des ateliers, des lectures ou des animations, qui lui donnent des repères et la rassurent". Au début du confinement, le foyer a fermé ses portes et Amandine est retournée vivre chez ses parents à plein temps. "Le premier mois de confinement s’est plutôt bien passé, mais ensuite, la situation s’est dégradée, Amandine a commencé a être de plus en plus désorientée, à moins manger, elle s’est mise à écouter des comptines qu’elle écoutait petite alors que c’est une vraie fan de musique", rapporte la maman.

Enfermée dans son monde

Les parents d’Amandine ont contacté l’établissement et l’éducatrice qui s’occupe habituellement de leur fille est venue la voir à la maison. "Il ne s’est rien passé, en même temps, ça n’est pas évident d’avoir des interactions avec une personne en blouse avec des lunettes et un masque", regrette la maman. L’état d’Amandine s’est encore aggravé : "elle a arrêté de sourire". La famille a tout fait pour améliorer la situation : "Sa sœur d’une vingtaine d’années venait la voir très régulièrement et ça la rassurait beaucoup de la voir, mais ça ne durait pas longtemps et il n’y avait pas de réelle interactivité. Amandine s’est installée dans un nouveau monde bien à elle, avec ses comptines, quelques livres et ses rituels." Sonia regrette le manque de liens avec l’établissement. "Il y a bien eu quelques vidéos des personnes confinées là-bas, mais rien qui puisse rattacher Amandine a ses amis ou habitudes".

Sourire retrouvé

Le déconfinement est arrivé. Le foyer qui accueille Amandine a rouvert ses portes. Sonia se souvient : "J’ai pris une semaine de vacances pour l’accompagner dans son retour en établissement. Nous avons pris le temps de lui expliquer, de la rassurer. Elle était très angoissée, elle a beaucoup pleuré, elle ne voulait pas y retourner. Finalement le foyer nous a orienté vers un psychiatre qui lui a prescrit de légers antidépresseurs." À force d’accompagnement de la part de sa famille et grâce au suivi psychiatrique, la situation a fini par s’arranger et aujourd’hui, Amandine va mieux. Elle a retrouvé le sourire, mais le confinement l’a bouleversée. "Les équipes du foyer soupçonnent le développement d’un trouble autistique. Ce n’est sans doute pas lié directement au confinement, mais ça a peut-être accéléré les choses".

(* Les prénoms ont été modifiés).

Cinq conseils pour bien préparer à la séparation

Dans notre dossier consacrée aux chamboulements de la rentrée, nous vous donnions quelques conseils pour bien préparer vos enfants. Certains restent valables, notamment pour bien préparer à la séparation. 

1. Reprendre le rythme

Julie, enseignante dans le Vignoble : "Je conseille aux parents de prévoir, une semaine avant la rentrée, de redonner un rythme aux enfants. Pendant les vacances, on se lève et on se couche plus tard. Avant la rentrée, quelques couchers et levers à des horaires raisonnables me paraissent être une bonne base". 

Nicolas Peraldi, psychologue : "C’est important de préparer au rythme de l’école, du collège, du lycée ou d’un autre établissement au moins une semaine avant la rentrée". 

Sarah Guesmi, psychologue clinicienne "Il faut, dans la mesure du possible, que les enfants retrouvent leur rythme, aussi bien au niveau du sommeil ou de l’alimentation que de la vie sociale."

2. Être à l’écoute de ses enfants

Sarah Guesmi, psychologue clinicienne : "Il faut faire confiance aux enfants qui sont capables de se manifester quand ça ne va pas. Si vous observez des signes, comme des troubles du sommeil et de l’alimentation, de la tristesse ou de la colère qui surgissent, il faut être attentif. Mais il ne faut pas s’affoler non plus. Là où il faut s’inquiéter, c’est lorsque les symptômes s’installent dans le temps. Le plus important, c’est d’en parler avec l’enfant, mais aussi autour de soi, à des proches ou à des professionnels·les, de ne pas s’enfermer dans une situation, de rompre l’isolement."

3. Revoir les copains et les copines

Julie, enseignante dans le Vignoble : "Ça peut être bien de revoir les copains et les copines un peu avant la rentrée. Cela permet de partager le stress"

4. S’approprier la rentrée

Nicolas Peraldi, psychologue : " Pour les plus petits, organiser le cartable, les affaires,  avec eux leur permet de mieux se préparer à la rentrée".

5. Se faire accompagner

La rentrée que ce soit à l’école, en multi-accueil, chez une assistante maternelle, est souvent une période un peu agitée. En tant que parent, vous pouvez trouver du soutien auprès d’associations et de structures spécialisées.  

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