Deuil, décès d’un grand-parent, comment accompagner son enfant ?

Les grands-parents occupent souvent une place importante dans la vie des enfants. Leur disparition peut être compliquée à vivre. Dans ce dossier, Martine Quentric, bénévole de l’association Jusqu’à la mort, accompagner la vie (Jalmalv), vous donne quelques conseils pour mieux gérer cette situation. Plusieurs parents racontent également comment ça s’est passé chez eux.

Que peut-on dire à son enfant et comment l’accompagner ?

Martine Quentric est psychothérapeute et bénévole à l’association Jusqu’à la mort, accompagner la vie (Jalmalv) qui accompagne les personnes en fin de vie et les personnes endeuillées.

Quelle idée les enfants se font-ils de la mort et quelle est leur perception du deuil ?

Un enfant sait que la mort existe. Quand il est petit, il voit ça comme quelque chose de pas très grave et pas définitif. Autour d’une dizaine d’années, l’enfant sait que la mort est irréversible et que ça peut toucher tout le monde, même s’il ne s’imagine pas pouvoir mourir.

Que peut-on dire à son enfant ?

Avant même de pouvoir parler, l’enfant sait quand quelque chose ne va pas, même s’il ne sait pas vraiment de quoi il s’agit. L’enfant a besoin d’explications et de réponses. Même si c’est difficile, je pense qu’il faut dire la vérité et ne pas cacher sa tristesse. On peut pleurer devant son enfant et lui expliquer qu’on est très triste parce que « papy » ou « mamie » est mort.

Je me souviens d’un enfant à qui on avait dit que son « Papy » était monté au ciel et qui était terrorisé à chaque fois qu’il sortait dehors parce qu’il avait peur que son « papy » lui tombe sur la tête !

C’est important de bien lui dire que quand on est mort, on ne bouge plus, on ne souffre plus, mais aussi, qu’on ne reviendra pas. Si on lui dit « papy » ou « mamie » est parti, il va demander quand est-ce qu’il ou qu’elle va revenir. Si on lui dit que « papy » ou « mamie » nous a quitté, il va croire que la personne décédé l’a abandonné. Je me souviens d’un enfant à qui on avait dit que son « Papy » était monté au ciel et qui était terrorisé à chaque fois qu’il sortait dehors parce qu’il avait peur que son « papy » lui tombe sur la tête !

Comment accompagner son enfant dans cette situation ?

Si on ne lui explique pas, il va très vite penser que c’est de sa faute si sa maman ou son papa est triste. Il va réagir, soit en se mettant en colère, soit au contraire en étant plus « sage » que d’habitude. Quand il voit son papa ou sa maman triste parce qu’il ou elle a perdu son papa ou sa maman, il peut se demander si ça ne pourrait pas lui arriver à lui aussi de perdre ses parents. C’est important de rassurer l’enfant, de lui expliquer que quoiqu’il arrive, tout est organisé et qu’il y aura forcément quelqu’un pour s’occuper de lui.

Un enfant a besoin de partager le deuil.

À l’adolescence, on a plutôt tendance à vouloir cacher ses sentiments et on n’a pas forcément envie de les partager avec ses parents. L’ado peut parler du deuil avec ses copains et ses copines. Un enfant a besoin de partager le deuil. Si vous êtes trop triste pour en parler avec lui, il faut lui dire et lui proposer une solution : « moi je suis trop triste pour en parler, mais si tu veux nous pourrons en discuter avec tata, tonton etc. » Vous pouvez aussi vous orienter vers une association spécialisée comme Jalmalv.

Et au quotidien ?

À la maison, les parents doivent laisser de l’espace pour l’épanouissement de l’enfant. Même en deuil, il doit continuer à jouer et à s’amuser. En dehors du cadre familial, je pense que c’est important de prévenir les enseignants et les enseignantes si l’enfant est scolarisé, ou l’assistante maternelle ou la puéricultrice s’il est gardé. Les autres enfants peuvent être agressifs et l’enfant en deuil peut se retrouver un peu stigmatisé.

On doit continuer à parler de la personne qui est décédée. Le manque fait partie du deuil.

On doit continuer à parler de la personne qui est décédée, oser la nommer. Le manque fait partie du deuil et il faut aider l’enfant à le verbaliser : par exemple, « c’est notre premier Noël sans « mamie », ça fait bizarre ». On peut aussi entretenir le souvenir de la personne. « C’est avec papy que tu as appris à faire du vélo », « c’est mamie qui t’avait offert ce pull », etc.

Découvrez l’accompagnement au deuil pour les jeunes proposé par Jalmalv

Comment gérer le deuil avec les enfants ?

Antoine vit à Vertou. Il est papa de deux enfants de 6 et 9 ans. Il a perdu son père en 2021.

Mon père est tombé malade en 2021 et son état s’est dégradé très rapidement. Ça a été assez brutal car il ne montrait aucun signe de faiblesse et était très actif et très impliqué avec ses petits enfants. Ça a été le début d’une période très compliquée. Pour moi d’une part, car je ne me faisais aucune illusion sur l’issue et pour les enfants. Mon père a fait beaucoup d’effort pour cacher sa maladie aux enfants, mais ils ont vite vu qu’il était moins actif, moins disponible. Ils ont aussi remarqué qu’il perdait du poids. Très vite, ils nous ont posé plein de questions. Nous avons rapidement décidé de leur parler et de leur expliquer que leur grand-père était malade et que c’était grave. Je me souviens de Quentin, notre aîné, qui nous a alors demandé si "papou" allait mourir.

Et si on écrivait une lettre à "Papou"?

Quand il a posé la question, ça m’a fait réaliser que oui, mon père allait mourir. Je n’ai pas pu retenir mes larmes. Nous leur avons dit que oui, leur "papou" allait mourir et qu’on était très tristes et qu’ils avaient eux aussi le droit d’être tristes. Nous avons tous pleuré ensemble. Et puis ma compagne a dit aux enfants : "Et si on écrivait une lettre à "Papou"? On lui ferait de beaux dessins et surtout on lui raconterait tous les supers souvenirs qu’on a avec lui ?". Et pendant quelques mois, c’est devenu un rituel. Une fois par semaine, on écrivait une lettre à mon père, avec des souvenirs des enfants, des blagues pour le faire rire, des dessins, des photos, etc. et je lui transmettais quand j’allais le voir. Quelque temps avant sa mort, mon père m’a demandé de l’aider à écrire une lettre pour répondre aux enfants. Je leur ai lu quelques jours après son décès et il nous arrive de la relire de temps en temps encore. Je pense que ça a beaucoup aidé les enfants et ça m’a permis à moi de mieux vivre la situation.

Lise vit à Nantes. Elle est maman de trois enfants de 8, 12 et 15 ans. Elle a perdu ses deux parents dans un accident en 2018.

C’est ma sœur qui m’a appelé au travail pour me prévenir. C’était tellement brutal et inattendu que j’ai eu du mal à réaliser. Les enfants étaient tous à l’école quand j’ai appris la nouvelle. C’était d’autant plus horrible que mes parents devaient passer le week-end avec nous et que nous avions prévu plein de choses à faire avec les enfants. Lorsque mon mari est rentré de l’école avec les enfants, ils ont bien vu que quelque chose n’allait pas. Nous leur avons expliqué ce qui était arrivé, mais c’était difficile. À l’époque, les enfants avaient 3, 7 et 10 ans et forcément, ils n’ont pas compris les choses de la même façon. Surtout la plus jeune qui continuait à nous demander si "papy" et "mamie" allaient bientôt venir à la maison.
Je me sentais complètement incapable de gérer les enfants et de répondre à leurs questions.
Les deux plus grands n’arrêtaient pas de demander si leurs grands-parents avaient eu mal. Nous avons fini par demander à des amis s’ils ne pouvaient pas garder les enfants quelques jours. J’avais besoin d’espace et de temps pour digérer la nouvelle. Je me sentais complètement incapable de gérer les enfants et de répondre à leurs questions. C’est comme si je devais faire mon deuil à moi avant d’être capable d’en parler avec les enfants. J’en ai beaucoup parlé avec ma sœur qui a deux enfants. Elle était aussi démunie que moi, mais elle connaissait quelqu’un qui avait vécu la même chose. Nous sommes allées rencontrer cette personne et ça nous a fait du bien. J’ai aussi choisi de voir une psychologue qui m’a aidé à avancer.

 

 

Les lieux d’information, d’écoute et de soutien

  • L’association Jalmalv
    L’association Jalmalv Nantes existe depuis une trentaine d’années. Apolitique et non confessionnelle, elle accompagne des personnes atteintes de maladie grave, en fin de vie ou des personnes en deuil. Elle propose un accompagnement spécifique pour les enfants en deuil.
  • L’association Elisabeth Kübler-Ross
    L’association propose un accueil et un accompagnement individuel par des rencontres, des écoutes téléphoniques, des échanges de mails, ainsi qu’un accompagnement en groupe. Elle propose des accompagnements spécifiques en groupe pour les enfants âgés de 4 à 12 ans ayant perdu un proche.
  • Le dispositif MonPsy
    Si vous ou votre enfant (dès 3 ans) avez besoin de consulter un ou une psychologue, vous pouvez bénéficier de 8 séances qui seront remboursées par l’Assurance Maladie.
  • Les Pâtes au beurre
    L’association accueille gratuitement et anonymement les parents en difficulté, avec ou sans leurs enfants, quel que soit l’âge de ces derniers, pour réfléchir avec des professionnels, psychologues ou psychomotriciens, dans une visée d’apaisement des relations familiales.

Pour aller plus loin (Podcast, livres, vidéos, sites internet, etc.)

Podcasts :

Vidéos :

Livres :

  • Je ne te vois plus, Paul Martin (Éditions les 400 coups)
    Une petite fille s’interroge sur l’absence d’un être cher. En revoyant des objets qui lui ont appartenu, elle se rappelle les moments heureux qu’ils ont partagés ensemble, ce qui lui redonne le sourire.
  • Le fil invisible, Miriam Tirado et Marta Moreno (Éditions Eyrolles)
    Anna se demande à quoi peut bien servir son nombril... Sa maman lui dévoile alors un grand secret qui va tout changer ! Un fil invisible partirait de son nombril et l’unirait à tous ceux qu’elle aime le plus : sa mère, son père, ses grands-parents, ses amis...
  • Au revoir Blaireau, Susan Varley (Gallimard Jeunesse)
    Le vieux Blaireau va mourir, mais il existera toujours dans le cœur de ceux qui l’aiment, grâce aux souvenirs qu’il leur laisse. Les amis de Blaireau évoquent tout ce qu’il leur a appris et laissé en cadeau et, peu à peu, apprivoisent leur chagrin.

Sur le site Questions de parents :

 

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