Enfants à haut potentiel et précoces, qui sont-ils et comment les accompagner ?

HPI, précoce, surdoué, zèbre... les qualificatifs ne manquent pas pour désigner ces enfants différents. Les enfants HPI sont aujourd’hui mieux accompagnés et leurs besoins et leurs fonctionnements sont mieux compris. Dans ce dossier, vous retrouverez les témoignages de parents, de personnes précoces et de professionnels. Vous trouverez également des ressources pour mieux comprendre et accompagner votre enfant HPI.

HPI, ça veut dire quoi ?

Être "haut potentiel intellectuel (HPI)" signifie avoir une forme d’intelligence et un fonctionnement différents de ceux de la plupart des gens. Cela ne veut pas dire qu’on est plus intelligent que les autres ou au contraire que l’on a un retard de développement.

"La précocité intellectuelle est encore aujourd’hui une particularité neurologique, cognitive et psychologique peu connue. Elle concerne 2 à 3% des enfants. Elle est une forme d’intelligence qualitativement différente des enfants de l’âge concerné (raisonnement, capacité d’abstraction et mémoire importante), ainsi qu’un fonctionnement psychologique particulier (hypersensibilité, curiosité, empathie, lucidité intellectuelle, et souvent anxiété qui peut être liée à une peur importante de l’échec)." détaille Véronique Burban, psychologue à Nantes dans un courrier qu’elle fournit aux familles qu’elle reçoit.

 

Voici une liste non exhaustive de caractéristiques du HPI proposée par le site internet Rayures et ratures

  • Une grande curiosité intellectuelle, un fort besoin de stimulations, de nouveauté, d’apprendre.
  • Un traitement de l’information particulier. On reçoit beaucoup d’informations, et on traite… tout. Alors forcément, on a souvent l’impression d’en avoir “plein la tête”.
  • Le fait de penser “dans tous les sens”, tellement rapidement qu’on ne sait plus trop comment on est arrivé à un résultat.
  • Un besoin vital de sens. On se pose énormément de questions, on en pose aux autres, ça dérange parfois. Et il est difficile de se motiver ou de se concentrer si on ne comprend pas le sens de ce qu’on nous demande.
  • Des valeurs morales fortes et un sens de la justice aigu.
  • Une tendance à se camoufler, à se sur-adapter pour s’intégrer, au risque de perdre de vue qui on est vraiment

Quels sont les signes d’une précocité chez un enfant ?

Valentine vit à Clisson et est la maman de deux enfants, Isore 13 ans et Méline 16 ans.

Comment avez-vous découvert que vos enfants étaient précoces ?

Lorsqu’elle était en CE1, nous nous sommes rendus compte qu’Isore n’avait pas de copains. C’est sa grande sœur Méline qui nous a alertés. Nous nous sommes tournés vers l’équipe enseignante qui nous a dit que pour eux, tout allait bien. Des amis qui ont des neveux HPI nous ont dit que pour eux, Isore était précoce.

C’est vrai que quand on est dans le quotidien avec ses enfants, on ne fait pas forcément attention.

C’est vrai que quand on est dans le quotidien avec ses enfants, on ne fait pas forcément attention. Nous avons donc consulté une première psychologue qui nous a déconseillé de faire le test, arguant que cela risquait de stigmatiser notre fille. C’est finalement une médecin, elle-même HPI, qui nous a orientés vers une doctoresse en neuropsychologie qui nous a reçus et qui a pris le temps de discuter avec nous et avec Isore. En discutant, elle s’est rendu compte qu’il y avait des signes de précocité et a demandé à Isore si elle voulait passer les tests et il s’est avéré qu’elle était effectivement précoce. Méline a également passé les tests et elle aussi est précoce.

Quels peuvent être les signes d’une précocité ?

Les apprentissages scolaires sont adaptés aux enfants « classiques ». Souvent sous forme de cycles de 3 ans. Par exemple, la première année, on va leur faire toucher un glaçon, de l’eau liquide et observer de la vapeur d’eau. La deuxième année, on va leur expliquer que l’eau peut être solide, liquide ou gazeuse. La troisième année, on leur apprend le concept des différents états d’un corps : solide/liquide/gaz etc. Un enfant HPI n’a pas besoin de toutes ces étapes et va conceptualiser tout de suite. Leur comportement également sera différent.

L’enfant précoce peut déstabiliser les autres élèves, mais aussi les enseignants.

Par exemple, dans une cour d’école si tous les autres élèves jouent à la marelle, un enfant va, même s’il n’en a pas vraiment envie, jouer avec les autres, pour faire plaisir et s’intégrer au groupe. L’enfant précoce, s’il n’en a pas envie, dira qu’il ou elle ne veut pas jouer et sera mis à l’écart. L’enfant précoce peut déstabiliser les autres élèves, mais aussi les enseignants. Il ou elle va questionner les adultes, ce qui peut leur mettre la pression et souvent, peut passer pour de l’insolence. Cela nous est arrivé avec la maîtresse d’Isore en CE2. Le diagnostic HPI est souvent associé à de l’hypersensibilité. Par exemple, moi je suis très empathique. Mon conjoint lui, est très sensible aux bruits et aux odeurs.

 

Faut-il faire tester son enfant ?

Pour Valentine, maman de deux enfant HPI, le test a été une étape décisive pour mieux comprendre ses enfants :

L’intérêt de faire tester son enfant c’est de mieux comprendre son fonctionnement pour pouvoir bien l’accompagner. Une fois la décision prise, c’est essentiel de trouver quelqu’un qui vous accompagne vous et votre enfant, qui prend le temps de vous expliquer les choses. La docteur en neuropsychologie qui a fait passer les tests à Isore nous les a également présentés et nous a invité à essayer de les faire pour que nous puissions nous rendre compte et comprendre la différence de fonctionnement qu’il pouvait y avoir entre nous et notre fille.

Lorsqu’on lui a expliqué comment elle fonctionnait et pourquoi elle pouvait se sentir différente, ça lui a permis de comprendre, notamment son hypersensibilité et ça lui a redonné confiance en elle.

Bon, le truc c’est que nous avons découvert que mon conjoint et moi nous étions également HPI. Après le diagnostic, Isore a été orientée vers un groupe de parole le samedi matin. Nous l’accompagnions et cela nous a permis d’échanger avec d’autres parents. De son côté, Méline s’est beaucoup plus adaptée que sa petite sœur, mais lorsqu’on lui a expliqué comment elle fonctionnait et pourquoi elle pouvait se sentir différente, ça lui a permis de comprendre, notamment son hypersensibilité et ça lui a redonné confiance en elle.

De son côté, Jérôme, lui même HPI, ne pense pas faire tester ses enfants :

Je n’ai jamais eu d’accompagnement spécifique. Mes parents ont toujours fait attention à ce que l’établissement scolaire où j’étais propose suffisamment d’activités ou d’options pour que je ne m’ennuie pas. Aujourd’hui, avec ma compagne, nous pensons que notre fille aînée est précoce. Il y a des signes que j’ai reconnus.

Ça nous importe plus d’être capables de l’accompagner dans son cheminement pour savoir qui elle est et qu’elle soit bien dans sa peau, plutôt que de la mettre dans une case

Elle est déjà pas mal suivie et le test ne nous paraît pas être une priorité. Ça nous importe plus d’être capables de l’accompagner dans son cheminement pour savoir qui elle est et qu’elle soit bien dans sa peau, plutôt que de la mettre dans une case. Mais c’est parce que je sais ce que c’est. J’entends tout à fait que les parents pour qui la précocité de leur enfant est une surprise, fassent un test et se fassent accompagner. C’est essentiel et cela permet sans doute de comprendre beaucoup de choses sur son enfant.

L’avis d’une professionnelle :

"Le test permet de comprendre des spécificités et d’avoir une meilleure perception de soi et des décalages ressentis, mais aussi de mieux se positionner, comprendre ses comportements, ceux des autres, et de répondre à certains besoins.", explique une psychologue qui travaille avec des enfants précoces.

Doit-on en parler à l’école ?

Dans un courrier qu’elle adresse aux parents dont elle suit les enfants, cette psychologue explique pourquoi elle conseille d’en parler avec les équipes enseignantes :

"Je conseille aux parents que je rencontre d’informer les enseignants de cette particularité, tout au long du parcours de l’enfant. Les parents évitent souvent d’en parler, de crainte de provoquer une réaction négative envers eux-mêmes et envers leur enfant. Il y a aujourd’hui bien trop d’idées reçues sur ces enfants. La scolarité chaotique et certaines difficultés qu’ils rencontrent ne sont pas assez connues et si elles l’étaient, pourraient être évitées. En tant que professionnelle accompagnant les enfants présentant des particularités, des difficultés, quelles qu’elles soient, il me paraît essentiel d’informer sur ces questions, afin d’aider les enfants à s’épanouir et à investir leur scolarité."

 Voir aussi : La Scolarisation des élèves à haut potentiel sur le site de l’Académie de Nantes

 

Comment grandit-on en étant HPI ?

Jérôme a 37 ans, il vit à Nantes et a deux filles de 6 et 4 ans

Comment vous êtes-vous rendu compte que vous étiez HPI ?

Je me souviens que je jouais peu avec les autres enfants. Je me sentais plus proche des filles que des garçons. En primaire, j’étais dans une classe mixte avec deux niveaux et deux programmes. Cela ne me posait pas de problème. Ma mère voulait que je saute une classe, mais l’enseignant n’était pas d’accord ; il estimait que j’avais le niveau mais que je ne n’étais pas assez mûr.

On m’a diagnostiqué -  à l’époque on appelait ça un "diagnostic" - surdoué. Une étiquette que j’ai portée une partie de ma scolarité.

Mes parents m’ont fait passé un test pour mettre fin au conflit avec l’enseignante. C’était en 1995, j’étais en CM1. Je me souviens que le test était un peu stressant. La personne qui me l’a fait passer restait impassible. Je ne savais pas si je répondais correctement ou pas. On m’a diagnostiqué -  à l’époque on appelait ça un "diagnostic" - surdoué. Une étiquette que j’ai portée une partie de ma scolarité.

 Et au collège ou au lycée, comment ça s’est passé ?

Je suis arrivé au collège à 10 ans. J’étais plus petit, plus jeune et j’avais cette étiquette de surdoué qui me mettait dans une position bizarre par rapport aux autres élèves. Il fallait souvent que j’explique mon cas. De la 6e à la 4e, j’avais très peu d’amis. Je passais mon temps libre à lire dans les couloirs du collège.

Je n’étais pas en souffrance. Pour moi, c’était normal.

Je n’étais pas invité aux anniversaires et aux fêtes de fin d’année. Mais je n’étais pas en souffrance. Pour moi, c’était normal. Ma famille a déménagé et je suis arrivé dans un nouveau collège pour mon entrée en 3e. Dans ma classe, il y avait trois autres enfants comme moi. Je me souviens de mon premier jour où l’un d’entre eux est directement venu vers moi et m’a dit "toi, tu vas être mon copain". Il a été mon témoin de mariage. Ces copains là constituent encore aujourd’hui mon noyau dur d’amitiés. Le lycée a été beaucoup plus facile. Nous étions plus nombreux à être différents. Plusieurs élèves avaient sauté une classe, d’autres avaient redoublé. Et puis j’avais grandi et changé. Les différences physiques ont disparu.

 Quels signes particuliers sont propres à votre précocité ?

Une grande hypersensibilité qui s’est longtemps caractérisée par des maux de ventre ou des migraines très intenses lorsque je faisais face à une situation compliquée ou angoissante. J’ai aussi longtemps été très sensible aux bruits et aux odeurs. Gamin je me souviens d’être allé chez un copain qui avait un chien et dont la mère fumait. J’ai vomi en rentrant chez moi.

Mon hypersensibilité m’a aussi joué des tours dans ma carrière professionnelle

À une époque, l’odeur du métro à Paris me rendait malade. J’étais malade en voiture. Mes réactions sont moins intenses aujourd’hui. Mais si par exemple je vais dans un bar où il y a beaucoup de monde, de bruit et de musique, tout se mélange et je n’entends plus rien. Mon hypersensibilité m’a aussi joué des tours dans ma carrière professionnelle. Ma grande sensibilité me rendait très timide. Je me suis fait marcher sur les pieds plusieurs fois, j’avais toujours envie de bien faire. Tout ça m’a sans doute freiné professionnellement.

 

 

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