Comment accompagner le trouble de l’attention chez l’enfant ?

Le trouble déficitaire de l’attention (TDA), parfois avec de l’hyperactivité (TDAH), est souvent mis en avant pour expliquer des difficultés chez les enfants. Mais qu’en est-il vraiment ? Dans ce dossier, Arnaud Roy, neuropsychologue et responsable du Centre de référence des troubles d’apprentissages (CRTA) dans le service pédiatrie du CHU de Nantes, vous éclaire sur la définition complexe de ces troubles et sur l’accompagnement adapté qui peut être mis en place. De son côté, Lisa, la maman d’un enfant avec un TDA, nous raconte son parcours et son quotidien.

Le TDA et le TDAH, c’est quoi ? Et comment peut-on accompagner son enfant ?

Arnaud Roy est neuropsychologue et professeur à l’Université d’Angers. Il est responsable du Centre de référence des troubles d’apprentissages (CRTA) dans le service pédiatrie du CHU de Nantes.

De quoi parle-t-on quand on évoque le trouble déficitaire de l’attention ?

Avant tout, il convient de rappeler qu’il existe différentes formes d’attention. Schématiquement, on en distingue trois formes principales : l’attention sélective (être, par exemple, capable d’écouter ce que quelqu’un dit sans se laisser perturber par l’environnement), l’attention soutenue (être capable d’être attentif dans la durée) et l’attention partagée (être capable de faire deux choses en même temps.

Il faut souligner la complexité de ces mécanismes attentionnels qui non seulement mettent du temps à se développer, mais qui en plus ne suivent pas tous le même calendrier.

Une fois ce rappel fait, il faut souligner la complexité de ces mécanismes attentionnels qui non seulement mettent du temps à se développer, mais qui en plus ne suivent pas tous le même calendrier. L’attention sélective progresse par exemple assez rapidement, dès les premières années de vie, mais l’attention soutenue ou partagée ne sont, en général, pas pleinement opérationnelles avant l’adolescence. Le cerveau humain n’est pas physiologiquement mature avant 20 ou 25 ans et les zones du contrôle de l’attention sont parmi celles qui mettent le plus longtemps à se développer. Quand on parle de trouble déficitaire de l’attention, on parle d’un trouble du neurodéveloppement, autrement dit d’un développement atypique des mécanismes attentionnels et des réseaux du cerveau qui sous-tendent leur fonctionnement ; ce trouble d’attention peut s’associer ou pas à une agitation motrice et une impulsivité : on parle de trouble déficitaire de l’attention (TDA) avec ou sans hyperactivité/impulsivité (ou TDAH).

Quels sont les signes qui peuvent alerter  ?

Chez les tous petits, il y a une grande variabilité et il est normal qu’un très jeune enfant puisse paraître dispersé ou rencontre des difficultés à rester concentrer. C’est souvent avec l’entrée à l’école maternelle qu’on peut découvrir les premiers signes. Les enseignantes et enseignants, habitués du comportement des enfants en général, sont souvent celles et ceux qui sont susceptibles d’alerter face au comportement particulier d’un enfant.
Il faut rester prudent ; un enfant, par définition, c’est un peu « remuant », « ça bouge ».
Le lâcher prise sur une activité, la difficulté à poser le regard, l’incapacité à rester en place, peuvent, par exemple, être des signes d’alerte évocateurs de troubles de l’attention. Mais encore une fois, il faut rester prudent ; un enfant, par définition, c’est un peu « remuant », « ça bouge ». C’est la différence avec le reste de la classe qui va être potentiellement déterminante. On peut aussi être alerté par des différences observées au sein de la fratrie, ou avec les autres enfants de la famille ou des proches, ou encore dans les activités extrascolaires, qui interpellent. Retrouver ces écarts dans des contextes différents (à la maison et à l’école en particulier) et s’apercevoir qu’ils perturbent de manière significative et durable la vie de tous les jours font partie des critères et de la démarche conduisant au diagnostic. Dans tous les cas, il est primordial de confronter les regards extérieurs.

Que faire si on est inquiet pour son enfant ?

Il faut consulter. Mais pas n’importe qui. Attention aux thérapeutes en tous genres qui sortent du champ de la santé conventionnelle et qui proposent des « consultations » ou méthodes qui, au-delà d’être onéreuses ne reposent sur aucun fait scientifique avéré. Je conseillerai, dans un premier temps, de prendre rendez-vous avec un ou une pédiatre ou la PMI.

Les troubles doivent être authentifiés par un spécialiste de la santé qui connait bien ce type de syndrome.

Ce premier rendez-vous est très important car les troubles doivent être authentifiés par un spécialiste de la santé qui connait bien ce type de syndrome, et qui sait que les troubles de l’attention peuvent avoir des causes multiples et variées. On peut par exemple avoir un enfant qui présente des signes d’alerte mais qui après un examen clinique a un trouble visuel qui n’avait pas été décelé et qui entraine des troubles de l’attention. Un contexte de vie anxieux, des évènements familiaux éprouvants, des difficultés d’apprentissage à l’école, peuvent également générer des difficultés de mobilisation attentionnelle et une agitation motrice qui sont principalement liées à ce contexte, qu’il faut identifier et accompagner le cas échéant.

Dans l’idéal, ce diagnostic sera appuyé par un bilan neuropsychologique réalisé par une ou un psychologue clinicien spécialisé dans ce domaine.

Dans certains cas, un contexte clinique précis peut venir expliquer les symptômes, comme dans le cas d’une naissance prématurée qui entraîne plus de risque de présenter des troubles de l’attention. Certains contextes de traumatismes ou de violences peuvent aussi favoriser ces troubles. En cas de doute avéré, la ou le pédiatre ou la ou le médecin orientera vers une ou un neuro-pédiatre, un ou une pédopsychiatre qui peut poser le diagnostic. Dans l’idéal, ce diagnostic sera appuyé par un bilan neuropsychologique réalisé par une ou un psychologue clinicien spécialisé dans ce domaine, qui peut par le biais de différents outils spécialisés (entretien clinique, tests d’évaluation de l’attention, questionnaires de vie quotidienne…) réaliser une « photo » plus précise du fonctionnement cognitif et émotionnel de l’enfant, en particulier de ses capacités attentionnelles, en regard des attendus pour l’âge.

Comment peut-on accompagner son enfant ?

Il n’existe, hélas, pas de recette miracle. Les facteurs sont tellement nombreux qu’il faut prioriser un accompagnement « sur mesure ». C’est pourquoi le diagnostic est important. Les professionnelles et professionnels de santé qui ont établi le diagnostic fournissent généralement des préconisations en fonction du profil de l’enfant et de la nature/sévérité de ses difficultés. Des traitements médicamenteux existent, qui peuvent être très efficaces s’ils donnés à bon escient (mais avec de possibles effets secondaires) mais qui le sont sous contrôle médical.

Il est essentiel que l’enfant reste acteur de ces différentes formes d’accompagnement

Un accompagnement psychologique voire neuropsychologique (pour réduire l’impact des troubles attentionnels) est essentiel pour aider l’enfant et sa famille. De même, un suivi psychomoteur par exemple via la relaxation ou différentes techniques d’expression corporelle peut être une option très intéressante. Pour les parents, des conseils peuvent être donnés pour aider au quotidien comme, par exemple, diminuer les sources de perturbation (ne pas laisser la télé allumée pendant les devoirs, se mettre dans une pièce au calme), aider son enfant à s’organiser, découper les activités de la journée et favoriser la verbalisation avec l’enfant de ses difficultés. Il est essentiel que l’enfant reste acteur de ces différentes formes d’accompagnement. Une autre chose très importante, consiste à impérativement conserver les activités de l’enfant (sport, culture, loisirs, etc.) et de maintenir les liens entre la maison, l’école et les professionnels, en particulier l’école qui doit pouvoir ajuster, dans la mesure du possible, le rythme et les modalités des apprentissages afin de favoriser au mieux la qualité de vie de l’enfant et ses progrès.

Le CRTA est un centre de ressources. Que vous soyez parents ou professionnelles et professionnels (enseignantes, enseignants, médecins, etc.), n’hésitez à contacter l’équipe pluridisciplinaire qui le compose en cas de questions.

Comment vit-on le TDA de son enfant au quotidien ?

Lisa vit à Nantes. Son fils Arthur qui a 16 ans aujourd’hui, vit avec un TDA depuis son enfance. Elle nous raconte son parcours.

Quand vous êtes-vous rendus compte des troubles de votre fils ?

Petit à petit. À la crèche, par exemple, Arthur a mis du temps à marcher. Il observait beaucoup les autres bébés qui marchaient, mais il avait du mal à se lancer. À l’école, il avait des difficultés à laisser une trace ; que ce soit dans l’écriture ou le dessin.

Les choses se sont aggravées en CP. Arthur avait des difficultés spatiales, notamment dans la connaissance de son corps. Il était très impulsif et intervenait de façon inadaptée.

Les choses se sont aggravées en CP. Arthur avait des difficultés spatiales, notamment dans la connaissance de son corps. Il était très impulsif et intervenait de façon inadaptée, en interrompant les autres enfants et les adultes ; ce qui peut rapidement passer pour de l’impolitesse. Par exemple, il posait des questions mais n’attendait pas la réponse. Il parlait tout le temps, il avait du mal à tenir en place, se précipitait pour répondre aux questions des enseignants et faire les exercices. Il était persuadé qu’à partir du moment ou il avait répondu – même si ses réponses étaient fausses - , il avait bon.

À quel moment le diagnostic a-t-il été posé ?

Quand il a eu 8 ans, nous avons fini par avoir un diagnostic. Jusqu’à présent, nous pensions qu’il avait un trouble Dys, mais il s’est avéré que c’était un trouble de l’attention. Ça a été très dur pour nous. L’idée a même été évoquée qu’Arthur pourrait aller dans un établissement spécialisé.

C’était très difficile à vivre. C’est épuisant pour les parents et pour les proches.

À la maison ça ne s’arrangeait pas. Arthur ne ne tenait pas en place et faisait régulièrement des crises de colères avec des épisodes de violence ou des crises en pleine rue. C’était très difficile à vivre. C’est épuisant pour les parents et pour les proches. Et c’est difficile et long pour avoir un diagnostic et un accompagnement adéquat. Il ne faut vraiment pas hésiter à aller chercher de l’aide partout où c’est possible.

Comment avez-vous été accompagnés ?

Nous avons été très entourés par les enseignants qui étaient très compréhensifs. Nous avons aussi cherché et trouver des professionnels avec qui ça se passait bien, notamment une psychomotricienne et une orthophoniste incroyables. Nous avons aussi inscrit Arthur à des séances d’art thérapie qui lui ont été d’une grande aide.

Nous nous sommes rapprochés d’associations avec d’autres parents qui vivaient la même chose que nous. Ça, c’est primordial.

Et bien sûr, nous nous sommes rapprochés d’associations avec d’autres parents qui vivaient la même chose que nous. Ça, c’est primordial. Tout cela nous a demandé de l’énergie, du temps et représente aussi un coût financier qu’il faut pouvoir assumer. Mais ça en valait la peine. Nous avons revu la neuropsychologue et elle a été épatée par les progrès d’Arthur. Les choses se sont arrangées. Arthur a appris à avoir confiance en lui et à se calmer. Nous, nous avons appris à nous adapter aussi.

Et aujourd’hui, comment ça se passe ?

À partir du CM1, Arthur a été accompagné par une assistante de vie scolaire. Il a été orienté vers une classe Segpa pour la 6e. Ça peut rebuter certains parents, mais franchement c’était super. Il s’est vraiment épanoui en Segpa. Il ne faut pas en avoir peur, au contraire. Aujourd’hui Arthur est adolescent et il a trouvé sa voie. Il a appris à verbaliser autour de ses troubles et à gérer sa vie de façon adaptée. Notre chance c’est d’avoir eu un diagnostic assez tôt.

Les lieux d’écoute, d’information et de soutien

Les centres médico-psychologiques pour enfants et adolescents (CMPEA)

Les CMPEA assurent la prise en charge en ambulatoire (pendant la journée, on ne passe pas de nuit sur place) des enfants et adolescents qui ont des difficultés psychologiques, relationnelles, comportementales, ou encore des retards dans le langage écrit ou oral. Les équipes des CMPEA sont constituées de pédopsychiatres, psychologues, psychomotriciens et psychomotriciennes, orthophonistes, rééducateurs et rééducatrices en psychopédagogie, infirmiers et infirmières...Mais aussi des enseignantes et des enseignants spécialisés. 

Attention, les délais d’attente peuvent être très longs

Le Centre de Référence des Troubles d’Apprentissages (CRTA) des Pays de la Loire

Le CRTA s’adresse à des enfants qui présentent des difficultés d’apprentissages, sévères, complexes et durables, pour lesquelles des investigations ont déjà été menées en amont par des équipes de proximité réparties sur la région Pays de La Loire. Le CRTA ne réalise pas une évaluation de première intention, ni une prise en charge thérapeutique des enfants. Le CRTA est un centre de ressources. Que vous soyez parents ou professionnelles et professionnels (enseignantes, enseignants, médecins etc.), n’hésitez à contacter l’équipe en cas de questions. 

L’association HyperSupers TDAH

Cette association nationale propose des rencontres et des événements en Loire-Atlantique. Elle dispose aussi de correspondantes et correspondants locaux que vous pouvez contacter.

Pour aller plus loin (Podcasts, vidéos, livres etc.)

Podcasts :

Vidéos :

Livres/BD :

  • Lucine et Enzo (BD, Emma, Massot éditions)
    Enzo est un enfant pas comme les autres. Dès le plus jeune âge, Lucine, sa maman, l’a bien compris. Turbulent, inattentif, Enzo peine à suivre en classe, n’arrive pas à se faire des amis, est pris en grippe par les enseignantes et les enseignants.
  • Mon cerveau a besoin de lunettes (Docteure Annick Vincent, Éditions de L’homme)
    Tom a 8 ans et compose avec le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). À travers son journal fictif, il ouvre les portes de son quotidien et permet aux jeunes, mais aussi aux parents et aux intervenants, de mieux comprendre le TDAH et de l’apprivoiser.

Sur internet :

 

Vous souhaitez échanger avec d’autres parents ?

Rejoignez la communauté des parents de Loire-Atlantique sur facebook

Retour en haut de page