Comment parler du danger aux enfants sans leur faire peur ?

Le danger. Voilà bien une notion qui terrifie sans doute plus les parents que les enfants. Pourtant, le danger est quelque chose qui s’apprend dès le plus jeune âge. Poser des limites et des interdits, les expliquer, en parler, font partie des solutions pour ne pas vous inquiéter plus que nécessaire. Dans ce dossier, Sarah Guesmi, psychologue clinicienne vous conseille pour aborder le sujet avec vos enfants et des parents racontent comment ça se passe chez eux.

Quand et comment parler du danger ?

Sarah Guesmi est psychologue clinicienne au service de la protection de l’enfance du Département de Loire-Atlantique.


À quel âge peut-on commencer à parler du danger à un enfant ?

L’apprentissage du danger se fait dès le plus jeune âge de l’enfant et tout au long de son développement. Lorsque vous allaitez votre enfant ou que vous lui donnez le biberon, il vous arrive de lui dire d’aller plus doucement, de faire attention à ne pas s’étouffer ; c’est déjà une forme d’apprentissage des limites. En tant que parent, vous devez l’accompagner à observer et à appréhender ce qu’il y a autour de lui. De plus, cela sera rassurant pour lui de savoir que vous vous préoccupez de sa sécurité. Plus vous éduquez votre enfant au danger tôt, plus ce sera du temps de gagné quand il sera plus grand.

Comment peut-on accompagner son enfant ?

L’univers de l’enfant est infini. C’est aux parents de poser des limites et des interdits. Dire non, c’est accepter une réaction de l’enfant qui peut montrer de la frustration et du mécontentement. L’accompagnement se fait, bien sûr, par la parole, mais aussi en aidant l’enfant à prendre conscience du danger par le corps : lui montrer qu’il peut se faire mal sur un coin de table, lui apprendre à descendre une marche en marche-arrière, que la chaleur ça brûle, etc. Il faut aussi accepter de faire le pari que le petit bobo sera formateur et participera à la prise de conscience du danger. L’enfant doit pouvoir expérimenter. Quand un enfant apprend à marcher, il tombe sur les fesses. Ces chutes font partie de l’apprentissage de la marche. Au quotidien, c’est important d’apprendre à votre enfant à observer son environnement pour traverser une rue ou la route, à marcher sur le trottoir, à être attentif à ce qui se passe autour de lui.

Et lorsque l’enfant est plus grand ?

Si vous avez bien défini les limites et pris le temps d’accompagner votre enfant dans sa prise de conscience du danger dès son plus jeune âge, normalement, vers 7 ou 8 ans, le gros du travail est fait. Bien sûr, il faut continuer à poser des limites et à accompagner l’enfant. Il faut redire, répéter jusqu’à ce que ce soit intériorisé par l’enfant. Border les dangers prend du temps et on ne peut pas tout interdire, surtout lorsque l’enfant grandit et a de plus en plus envie d’autonomie. Si votre enfant veut faire du vélo, vous n’allez pas lui dire "non, tu ne feras pas de vélo", mais plutôt lui dire "d’accord" et suivant son âge, soit aller avec lui, soit lui rappeler qu’il doit faire attention et qu’il ne doit pas aller plus loin que telle rue ou telle limite. 

Comment éviter de transmettre ses peurs à son enfant ?

Ce n’est pas toujours facile de ne pas projeter ses propres angoisses sur son enfant. Cela peut générer de l’anxiété chez l’enfant. La peur est souvent du côté des parents. Par exemple, lorsqu’il s’agit d’envisager une rencontre avec une personne inconnue ou mal intentionnée. Bien sûr, suivant l’âge de l’enfant, il faut expliquer les risques et aider l’enfant à dissocier les comportements malveillants des attitudes bienveillantes. Le risque est de façonner de futurs adultes méfiants et qui ont auront du mal à faire confiance aux autres. C’est très difficile de se construire dans la méfiance des autres. Si on a peur, en tant que parent, il faut trouver des parades qui n’empêchent pas l’enfant de vivre pleinement son besoin d’autonomie. Par exemple si votre enfant veut aller à l’école tout seul, il peut le faire avec un groupe de copains.

Et vous, avez-vous peur pour vos enfants ?

 Guylène est la maman de Manon, 10 ans.

"J’ai beaucoup de mal à laisser du champ à Manon. Quand elle me demande si elle peut faire telle chose ou aller à tel endroit toute seule, je lui dis qu’elle pourra quand elle sera plus grande. Le problème, c’est qu’elle a 10 ans et que je lui dis ça depuis des années ! Et Manon s’énerve et me demande :" mais c’est quand que je serai plus grande ?". Ma nouvelle parade c’est de lui répondre : "quand tu seras au collège". Et de fait, à la rentrée prochaine, elle va devoir aller et revenir à pied au collège au moins deux ou trois fois dans la semaine. Bien sûr, j’en ai déjà parlé aux parents de copines qui seront dans le même collège ; elles feront une partie ou tout le trajet ensemble. Mais je ne peux m’empêcher d’avoir peur qu’il lui arrive quelque chose. On entend tellement d’histoires, et ça va tellement vite. Il n’y a pas longtemps j’ai vu un documentaire sur la disparition de la petite Maddie en Espagne. Ses parents étaient au restaurant à 100 m quand elle s’est fait enlever ! Régulièrement, je sermonne Manon : "tu ne suis pas un inconnu, tu ne montes pas dans la voiture d’un inconnu etc.". La dernière fois, elle m’a répondu : "et si c’est la police, je fais quoi ?". Même si ça m’a traversé l’esprit, je n’allais quand même pas lui répondre que quelqu’un de malveillant peut se déguiser en policier !"

Agathe et Mathieu sont les parents de Théo, 7 ans et Zoé, 2 ans. 

"Nous avons vécu à la campagne, à côté de Pontchâteau, pendant 6 ans et puis, pour des raisons de santé [Zoé, la petite soeur de Théo a besoin de soins réguliers au CHU de Nantes], nous avons dû déménager sur Nantes. Ça a été un vrai changement pour Théo. Il était habitué à se promener tout seul dans le village, à faire du vélo sur les petites routes autour de la maison. En quelques mois, nous avons dû lui apprendre à faire attention à tous les dangers de la ville. Les règles de déplacements à pied ou en vélo ont radicalement changées et ce est autorisé ou pas aussi. Pour l’accompagner, nous avons pris le temps d’explorer un peu le quartier avec lui. D’abord à pied, puis en vélo, en lui montrant les endroits potentiellement dangereux, là où il devait s’arrêter, les commerces où il pouvait aller demander de l’aide s’il avait un problème etc. Au fur et à mesure de nos balades, nous lui avons laissé de plus en plus de champ. Pour lui montrer que nous lui faisions confiance, nous lui avons proposé que ce soit lui qui nous serve de guide dans le quartier. Nous lui avons aussi proposé de dessiner une carte du pâté de maison autour de l’appartement qui matérialisait tous les dangers, mais aussi tous les lieux où il pouvait prendre un peu plus de liberté. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait que cette carte était évolutive et qu’au fur et à mesure du temps et de ses connaissances, il pourrait compléter la carte pour aller un peu plus loin. Nous avons fait des copies de la carte et ajouté nos numéros de téléphone dessus. Il doit toujours en avoir une sur lui." 

Et vous ? Êtes-vous plutôt un parent cool ou parent un stressé ?

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Quels lieux pour en parler et vous faire accompagner ?

L’association SOS inceste et violences sexuelles accueille les victimes de violences sexuelles et leurs proches. Son équipe propose un accompagnement, de l’écoute et du soutien lors de temps de rencontres anonymes individuels ou collectifs.

Les pâtes au beurre est une association en faveur de la santé des relations dans la famille. Créée à Nantes par Sophie Marinopoulos, psychologue, psychanalyste, spécialisée dans les questions de l’enfance et de la famille.

Faciliter le quotidien des parents : c’est l’objectif de l’association L’École des parents et des éducateurs de Loire-Atlantique (Epe 44). Grâce à elle, vous pouvez par exemple discuter avec un psychologue du harcèlement à l’école, évoquer votre place de père lors d’une séparation, ou encore débattre des risques liés aux écrans chez les jeunes enfants. l’Epe 44 vous propose à vous, parents et familles, des solutions d’écoute, de débat et d’accompagnement, individuelles et collectives.

 

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